J’aurai décidément connu le divorce sous toutes ses grandes réformes, quatre en tout :
- La réforme issue de la Loi du 11 juillet 1975, il reste encore quelques litiges sur la prestation compensatoire du temps où elle était versée à vie
- La réforme issue de la Loi du 26 mai 2014 qui est la loi appliquée aux procédures actuelles et avant l’entrée en vigueur de la Loi du 23 mars 2019 dont je vais vous parler
- La réforme du divorce par consentement mutuel issue de la Loi du 17 novembre 2016
- Enfin, la réforme issue de la Loi dite de programmation 2018-2022 du 23 mars 2019 dont il est sujet dans ce billet
Tout cela ne me rajeunit pas mais un avocat est comme le -bon- vin, il se bonifie avec le temps ^^.
1. Date de l'entrée en vigueur : à compter du décret d'application et au plus tard le 1er septembre 2020
Bien que cette Loi ait été promulguée le 25 mars 2019, certaines de ses dispositions et notamment celles concernant les procédures de divorce contentieuses n’entreront en vigueur, qu’à la date fixée par un décret d’application qui n’a pas encore été publiée.
Dans tous les cas, la Loi prévoit que la procédure de divorce contentieuse sera réformée en profondeur au plus tard le 1er septembre 2020.
2. Suppression de l'ordonnance de non conciliation
L’ordonnance de non conciliation va disparaître, en tout cas cette appellation « AOC » n’existera plus pour les procédures après le Décret.
Le juge pourra tout de même fixer les mesures provisoires durant la procédure de divorce mais ce ne sera pas systématique. Il s’agit là d’un gain de temps pour les couples sans bien ni enfant ou sans enjeux financiers. En revanche, l’accès au juge semble -encore - plus compliqué. On s’oriente davantage vers une procédure écrite… attendons de voir ce que cela donnera en pratique. On ne peut pas tout régler sans se parler, surtout en matière familiale. La réduction des coûts budgétaires étatiques l’explique et à Paris, la conception du nouveau Palais de Justice y contribue !
La procédure ne débutera plus par le dépôt d’une requête suivie d’une audience de conciliation mais directement par une assignation en divorce qui pourra indiquer ou non le motif du divorce, selon le type de divorce choisi.
Cela uniformise le moment clé qui sera l’introduction de la demande (assignation) et évite la saisine du juge en deux temps.
3. Conséquences sur la date des effets du divorce
La date des effets du divorce ne sera d’ailleurs plus automatiquement celle de l’audience de non conciliation mais sera fixée de la date de l’introduction de la demande. Cela est logique puisqu’entre le dépôt de la requête et l’ordonnance de non conciliation, il pouvait se passer plusieurs mois voire même plus d’un an selon les juridictions. La date des effets du divorce entre époux, c’est-à-dire celle qui marque le début de l’indivision et des comptes d’administration, sera donc celle de l’engagement officielle de la procédure pour les divorces contentieux ou de la séparation de corps.
Je rappelle que le choix de la date des effets du divorce sera essentielle et qu'il est possible de la faire rétroagir à la date de cessation de cohabitation et de collaboration des époux. Elle détermine la date de séparation des patrimoines pour les époux mariés sous le régime de la communauté, ce qui n'est pas rien.
4. Sur une acceptation du principe de la rupture du divorce en amont
Autre nouveauté, avant d’engager la procédure de divorce, les époux pourront immédiatement accepter le principe de la rupture du divorce via un acte privé contresigné avec leurs avocats respectifs.
5. Un an de séparation permettra de divorcer
Grande avancée, le divorce en altération pourra être obtenu dès un an de séparation et non plus deux ans.
6. La séparation de corps pourra se faire comme un consentement mutuel
Enfin, la séparation de corps est simplifiée et quand tout est amiable, la convention pourra se faire par acte sous signature privée contresigné par avocats déposé au rang des minutes d'un notaire, c’est-à-dire être se faire dans les mêmes conditions qu’on divorce par consentement mutuel, sans passer devant le juge.
L'intérêt financier de la séparation de corps est que chacun des époux reste héritiers de de l'autre mais la grand inconvénient est que le devoir de fidélité et tous les autres obligations du mariage subsistent. Cette procédure n'est donc pas une procédure de divorce et n'est que rarement conseillée soit pour des raisons religieuses soit en raison de l'âge des époux.
7.Ce n'est pas la Loi mais un conseil
La coexistence entre les anciennes procédures (celles avant le décret d’application de la Loi dite de programmation 2018-2022) et celles après le décret fera naître beaucoup de questions et d’enjeux financiers liés à la procédure, pensez à défendre vos intérêts en consultant votre avocat.